Comment expliquer cette réalité au plus grand nombre?

Nous sommes la cause des Changements Climatiques, soyons la solution.
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mardi 7 mars 2017

Pouvez vous imaginer le Groenland sans glace?

Adaptation de l'excellent documentaire What Scientists Are Seeing Over Greenland (Ce que les scientifiques voient du Groenland) réalisé par Spacerip, une de mes chaînes préférées.
Les scientifiques échantillonnent, percent, extraient des carottes de glace et survolent (avec des instruments embarqués) cette immense île parce qu'ils pensent que le Groenland est un indicateur important de notre avenir.
Le Groenland vu depuis l'espace.
Le Groenland a une superficie de 2 millions de km/2 dont 81 % est recouvert d'une imposante calotte glaciaire qui atteint 3km d'épaisseur et qui fait au total 2,85 millions de kilomètres cube de glace.

La fonte complète du Groenland entraînerait une hausse du niveau des océans de 7,2 mètres. Ne pas oublier la contribution de l’Antarctique, des glaciers terrestres et la dilatation du volume des océans à cause de la chaleur ; la hausse du niveau des océans n'arrêtera pas en 2100 mais se poursuivra certainement pendant des siècles.

NOTE : La fonte est plus rapide lorsque c'est nuageux car les nuages piègent la chaleur à basse altitude et la pluie brise la surface ce qui accroît aussi le taux de fonte.
Modélisation du Groenland sans glace réalisée grâce aux balayages radar de la mission "Ice Bridge (en Anglais)"
Le Groenland est bordé par deux chaînes de montagnes, l'une à l'Est et l'autre à l'Ouest. La dépression centrale est plus ou moins au niveau de la mer. Ces chaînes de montagnes se sont formées il y a 3 à 4 millions d'années et les montagnes ont été "sculptées"par des glaciers.
Les tracés de vols de la mission Ice Bridge.
À mesure que le Groenland sera libéré de sa glace, sa masse terrestre se soulèvera lentement, phénomène géologique qu'on nomme "rebond isostatique" (le poids de la glace disparaissant, cela décompresse la croûte terrestre et l'île Groenland va lentement s'élever) ce qui participera aussi à la hausse du niveau des océans. Cet article en Français explique bien le rebond isostatique et nous apprend que le rebond isostatique du Groenland est bien amorcé.

     Petite leçon de gravité

Parlant de la hausse du niveau des océans, je vais vous expliquer pourquoi le niveau de l'eau autour du Groenland va... baisser.

La masse attire la masse, c'est le principe même de la gravité. Donc, quand le Groenland "perd de la masse" il a moins "de force d'attraction" et donc, l'eau n’étant plus attirée par toute cette masse de glace, le niveau va diminuer "un peu" et graduellement sur une distance allant jusqu'à 1 000 km. La Relativité explique les choses différemment, mais le résultat est le même.



     La fonte

La question pressante : à quel rythme fondra le Groenland? Depuis ce documentaire, plusieurs études ont été publiées et les résultats ont de quoi nous faire penser à notre avenir commun.

De 2011 à 2014, le taux de fonte du Groenland a doublé (étude en Anglais) alors qu'il doublait environ aux 6 à 7 ans dans les décennies précédentes. Durant ces 4 années, il a fondu à un rythme de 269 ± 51 Gt/an. Il a atteint 474Gt pendant une année, on peut dire que la moyenne actuelle du taux de fonte du Groenland est très près, en moyenne, de 300 Gt/an. Ajouter 118 Gt/an pour la contribution de l'Antarctique selon la NASA.
NOTE 1 : Cela prend 380 Km3  de glace fondue pour élever le niveau des océans de 1mm.
NOTE 2 : Un Km cube de glace = 1 milliards (1 Gigatonne) de tonnes d'eau.
Nous comprenons maintenant pourquoi plusieurs pensent que les estimations du GIEC de 0,5 à 1 mètre pour 2100 sont vraiment trop basses. Je vais expliquer les causes des estimations très différentes de la hausse du niveau des océans dans un article à venir.

Le processus de fonte des calottes polaires en est un qui est extrêmement complexe et dynamique et c'est pourquoi les modèles donnent toujours des résultats inférieurs à la réalité (vidéo  explicative (en Anglais) du glaciologue Jason Box).

Une des clés pour l'accélération de la perte de glace exponentielle du Groenland sont les barrières (plates-formes) de glace. Ces barrières retiennent la glace sur la terre ferme, elles agissent littéralement  comme des bouchons. Ces barrières, souvent très épaisses fondent aussi par les dessous à cause de l'eau réchauffée qui y circule ; elles fondent donc très rapidement. Quand une barrière de glace disparaît ou cède, le glacier se déverse très rapidement dans l'océan accroissant la rapidité de l'inéluctable montée des eaux.

Il y a deux décennies à peine, certains croyaient que le Groenland et l'Antarctique ne fondraient pas à cause du réchauffement climatique, que ces deux calottes étaient "immuables". Nous savons maintenant qu'elles fondent et ces "croyants" commencent à comprendre qu'ils avaient tort, la réalité actuelle le leur démontre avec une certaine furie.

Article complémentaire : La calotte groenlandaise plus instable qu'on ne le pensait.

     Carottes de glace

Camp Century est l'endroit d'où les carottes de glace sont extraites.
À chaque années les couches de neige se succèdent. Le poids de cette neige compacte les couches inférieures qui deviennent névé puis glace. Dans cette glace sont conservées des bulles d'air de l'atmosphère lorsque la couche de neige est tombée ; c'est donc une succession de couches et plus on descend, plus on remonte le temps.

C'est en analysant ces bulles d'air qu'on "lit" le taux de CO2 ou de méthane au cours de l'histoire. On y trouve aussi des cendres volcaniques ou d'antiques feux de forêt, du pollen qui nous renseigne sur l'activité végétale, les types de plantes et des isotopes d'oxygène desquels on extrait la température. Bref, c'est l'histoire du climat et de certains événements majeurs qui nous est révélé dans ces petites bulles d'air.
On voit ici ce qui restait de glace lors de l'Eémien il y a environ 115 000 ans.
     En surface

Quand la neige fond, la poussière demeure et la surface devient donc de plus en plus sombre capturant ainsi plus de rayonnement, ce qui encore une fois accélère le rythme de la fonte. Un projet nommé "Dark Snow" (neige sombre) étudie ce phénomène. Ces poussières sont des particules de pollution, des cendres de feux de forêts, etc.

Avec l'augmentation des températures, la vie s'installe aussi dans de petites cuvettes. Cette "crasse" microbienne, foncée elle aussi, a le même effet que la poussière.

Ces milliards de trous sales à la surface du Groenland, nommés cryoconite, ont le diamètre d'un doigt.


Cryoconites aux abords d'un "moulin". Source Wikipedia
Il y a aussi ces crevasses contenant de l'eau de fonte et qui ont la taille d'un bus. Un phénomène supplémentaire qui accélère la fonte.

Source, cet article "Meltdown"
     De l'eau dans la glace

Si le Groenland fond si rapidement, c'est qu'il fond par le dessus, le dessous via l'apport d'eau chaude, et par le milieu.


Lacs de fonte sure le Groenland
Dans un premier temps, ces lacs de fonte absorbent au lieu de réfléchir le rayonnement solaire, ce qui accroît le taux de fonte en surface.

Ensuite, ces eaux génèrent des fissures dans la glace et s'écoulent  dans la calotte elle-même ce qui accroît aussi le taux de fonte. Ces eaux vont ensuite s'écouler vers la mer ou descendre au niveau du sol et ainsi lubrifier les glaciers par le dessous augmentant leurs taux d'écoulement vers la mer.

Le Groenland est maintenant ainsi fissuré sur de grandes surfaces.
Fissures dans la glace causées par l’eau de fonte. L'eau s'infiltre dans ces fissures et peut descendre jusqu'au socle rocheux via ce qu'on nomme les "moulins".
Voici un "moulin". Photo : James Balog du National Geographic
Vue en coupe de la calotte du Groenland. L'eau de fonte crée l'équivalent de nappes phréatiques à l'intérieur de l'inlandsis et le fait fondre de l'intérieur.
Tout cela mène aussi à l'écoulement des glaciers vers la mer. Ici, on voit le retrait de l'impressionnant glacier Jakobshavn qui retraite de 20 mètres par jour ; c'est le taux de retrait le plus rapide d'un glacier. Si son retrait est si rapide, c'est que le Jakobshavn n'a plus de barrière ; le "bouchon" qui le retenait a complètement fondu principalement à cause de l'eau maintenant trop chaude.



Plusieurs images et informations ont aussi été tirées de cette courte vidéo.

Nous sommes en voie de dénuder le Groenland de sa glace et nous allons nous prendre les pieds dans ses vêtements... 7,2 mètres d'un vêtement devenu liquide.

Nous dénudons aussi l'Antarctique et les glaciers terrestres. Nous ne savons pas à quelle vitesse le niveau des océans va monter, mais je pense que ce sera rapide. Ça fait plus de quatre ans que je suis intensivement l'activité climatique ; à chaque année quand ce n'est pas aux six mois, les prévisions de la hausse du niveau des océans augmentent en rapidité et en mètres.

     Une conséquence lourde de conséquences

L'eau de fonte du Groenland s'étale en surface sur une portion de l'Atlantique Nord. C'est parce que l'eau de fonte n'est pas salée et est donc moins dense qu'elle flotte à la surface ; c'est la zone bleue au Sud du Groenland qu'on voit ci-dessous.
Anomalies de température de surfaces océaniques. Source : Earth Nullschool
Cela a pour effet de ralentir et même dévier la portion Gulf Stream de la circulation thermohaline qui régule la température des eaux, du Nord est de l'Amérique et du Nord de l'Europe ce qui risque de bouleverser le climat des ces régions.
Voir cet article antérieur



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J'écris pour informer, merci de partager.

vendredi 3 mars 2017

Le méthane du fond de l'Arctique n'est apparemment pas le terrible monstre qu'on croyait

Je ne sais pas tout, donc, j'apprends.
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Révision à venir dans un prochain article. Plus les scientifiques poussent les recherches et les observations, mieux on comprend. La bombe méthane ne serait pas réelle, mais me vous réjouissez pas tout de suite.
Il s'échappe 1000 fois plus de CO2 que de méthane du pergélisol. Il n'y a pas assez de CO2 dans le pergélisol selon les plus récentes études pour dépasser les émissions de source humaine, mais il y en a suffisamment pour accélérer le réchauffement de façon notable sur des périodes décennale à centenaires.


Le méthane de l'Arctique est un aspect terrifiant du réchauffement climatique qui en inquiète plusieurs, et avec raison ; certains véhiculent même le message que ce serait la principale cause d'une extinction massive et rapide emportant évidemment aussi l'humanité dans l'oubli... mais d'ici une décennie? Il n'y a aucune preuve ni étude scientifique pour soutenir cette affirmation.

La science ne peut pas affirmer qu'un important relâchement de méthane se produira ou non ni quand ; elle ne peut qu'en évaluer la probabilité et cette étude montre que cette probabilité est moins élevée... (ce que j'ignorais à l'époque).
Hydrate de méthane du fond océanique. Source :The interaction of climate change and methane hydrates
J'ai parlé moi-même dans mes articles du "Monstre de l'Arctique" et de "l'Arme fatale du réchauffement climatique" en faisant référence au méthane... Depuis 2010 suite au documentaire "La Bombe Méthane" que je m'attends à ce qu'à n'importe quel moment qu'une immense quantité de méthane Arctique s'échappe et cause un très rapide réchauffement déclenchant une extinction massive... Ne soyons pas si pressé, elle viendra probablement quand même bien assez tôt avec toutes les terribles souffrances que cela implique.

Je vous fais savoir que je me suis dissocié et désabonné de Arctic-news et Sam Carana parce qu'ils véhiculent de fausses informations qui ne sont pas toujours scientifiques. Je tiens à la rectitude des informations que je vous partage. Aussi, les crises climatique et environnementale sont déjà assez terribles sans avoir besoin d'en rajouter... Restons lucide!

Mais qu'est ce qui est scientifique au juste? Les études scientifiques révisées/approuvées par des pairs ; tout le reste n'est que spéculation, hypothèse ou même fabulation. Ceci dit, il y a de fausses études que l'argent permet d'acheter, surtout l'argent des pétrolières en ce qui a trait au déni du réchauffement climatique. Mieux vaut avoir et développer une bonne éducation scientifique et/ou pouvoir contre-vérifier ces études avec d'autres sources fiables.

Selon cette récente étude scientifique (en Anglais) réalisé par la USGS (United States Geological Survey) qui est plutôt complète car elle s'est même intéressée aux recherches précédentes concernant tout ce qui touche au méthane ; le risque a été sur-estimé. Je souligne que Paul Beckwith du "Arctic Méthane Emergency Group"  vient de réaliser 6 vidéos en Anglais de 15 minutes chaque au sujet de cette étude qu'il épluche consciencieusement et avec rationnel.

     Expliquons le méthane

Le méthane (CH4) flambe parce que c'est l'ingrédient principal dans le gaz naturel ; c'est donc un combustible fossile à base de carbone, évidemment. Le méthane est un composé, c'est donc une molécule, composé de deux éléments : un atome de carbone (C) plus 4 atomes d'hydrogène (H4).

Dans le pergélisol terrestre, les bactéries décomposent la végétation fossilisée ; si il n'y a pas d'oxygène gazeux, les microbes produisent du méthane mais si la décomposition survient où de l'oxygène est disponible, c'est du CO2 que produisent d'autres bactéries.

Rappelons le, le méthane est un gaz à effet de serre très puissant, surtout à court terme. Kg pour kg, il est 150 fois plus puissant que le CO2 lors de ses 10 premières années dans l'atmosphère et 84 fois sur 20 ans ; après 100 ans, ça tombe à 34 fois.

On le retrouve à l'état gazeux et sous forme d'hydrates de méthane. Dans des conditions de froid et/ou de pression élevée, les hydrates de méthane se forment ; c'est une molécule de méthane emprisonnée dans une cage de glace.
Lorsque les hydrates de méthane fondent, elles se dilatent violemment et occupent 168 fois leur volume initiale ; c'est ce qui cause les cratères qu'on a vu apparaître en Sibérie depuis quelques années et c'est ce qui a laissé d'antiques cratères, certains aux dimensions impressionnantes,  en plusieurs endroits des fonds océaniques ; ces cratères datent de la dernière déglaciation et en se relâchant dans l'atmosphère, le méthane a accéléré la fonte selon l'hypothèse la plus acceptée.
Sibérie : cratère causé par le dégel puis l’expansion subite d'hydrates de méthane suite au réchauffement climatique. Plus de 30 de ces cratères sont répertoriés.


À noter :
  1. on les retrouve dans le pergélisol terrestre et sous-marin 
  2. les hydrates de méthane du fond marin sont stables à de grandes profondeurs, depuis 100 à 300 mètres selon la température de l'eau
  3. le méthane s'oxyde lentement en CO2 quand il se retrouve dans l'atmosphère (demie-vie d'une douzaine d'années)
  4. quand les bulles de méthane montent dans la colonne d'eau, des microbes le décomposent si la profondeur est suffisante
  5. s'il s'échappe depuis une faible profondeur, il se retrouvera presque totalement dans l’atmosphère
  6. si un relâchement important survient des profondeurs de l'océan, une partie se retrouvera dans l'atmosphère car les bactéries n'auront pas le temps de le décomposer en CO2
  7. dans les profondeurs, des bactéries se nourrissent du méthane
  8. les poches de gaz (rose sur le graphique) dans le sol relâchent leur méthane dans l'atmosphère
Le méthane provient de plusieurs autres sources : bovins, culture du riz, dépotoirs, extraction/production de gaz et de pétrole etc. Ce n'est pas la nature qui a ajouté le plus de méthane à l'atmosphère, ce sont nos activités.

Il n'est nullement question de nier que du méthane s'échappe de l'Arctique, surtout en ce qui concerne le pergélisol terrestre comme on le voit sur la photo ci-dessous. C'est la probabilité que de grandes quantité de méthane ne s’échappent du fond de l'océan Arctique qu'on a revu à la baisse. Il faut quand même faire tout notre possible pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre afin de préserver la biosphère : zone de seulement 10 à 20 km d'épaisseur entourant la Terre.

     Les conclusions de la nouvelle étude
Avertissement : le texte qui suit est la traduction des conclusions qu'on trouve dans l'étude, vous risquez de trouver le langage aride, comme nous. Je fais un condensé à la fin de l'article.
Les concentrations atmosphériques de CO2 ont augmenté de moins de 50% depuis l'ère préindustrielle alors que les concentrations de méthane se sont accrues d'environ 150% (à cause des émissions de source humaine).
Il y a très peu d'activité végétale dans les périodes glaciaires et pas de dégel, les taux de CO2 et de méthane sont donc au plus bas. Dans les périodes interglaciaires (chaudes) la végétation reprend vie et le pergélisol dégèle, donc, les taux de CO2 et de méthane augmentent.
NOTE : LGM signifie Dernier Maximum Glaciaire (Last Glacial Maximum).
L'holocène a débuté il y a environ 10 000 ans (Wikipedia Fr).
ppM = parties par Milliard ~ ppm = parties par million
De nos jours, les hydrates de méthane se dissocient dans des terrains spécifiques en réponse au réchauffement climatique post-DMG (depuis 20 000 ans) et fort probablement aussi en raison du réchauffement depuis le début de l'ère industrielle. Néanmoins, il n'y a aucune preuve concluante que le méthane libéré entre dans l'atmosphère à un niveau qui est détectable dans le contexte des émissions de 555 Tg par an de méthane (CH4), c'est à dire environ 555 millions de tonnes. 

Les estimations du GIEC ne sont pas fondées sur des mesures directes des flux de méthane provenant de la dissociation des hydrates de gaz et de nombreux modèles numériques adoptent des simplifications qui ne tiennent pas entièrement compte des puits, de la distribution réelle des hydrates de gaz ou d'autres facteurs.
(Les puits sont les endroits dans la nature où le méthane est absorbé et/ou décomposé/oxydé.)


Océan & atmosphère : la nouvelle génération de modèles basés sur la dynamique de la circulation océanique est la plus prometteuse pour prédire avec plus de certitude le devenir des hydrates de gaz dans les scénarios de changement climatique [Kretschmer et al., 2015] et pourrait être améliorée avec une meilleure incorporation des puits.

À des latitudes élevées (nordiques), les facteurs clés contribuant à la surestimation de la contribution de la dissociation des hydrates de gaz aux concentrations atmosphériques de CH4 sont l'hypothèse que les hydrates de gaz associés au pergélisol sont plus abondants et largement distribués que ce qui est probable [Ruppel, 2015] et l'extrapolation à l'ensemble de l'océan Arctique des émissions de CH4 mesurées dans une zone. 

Dire que les hydrates de gaz (méthane toujours) comme source des émissions de CH4 sur les plateaux continentaux à haute latitude donne un certain exotisme aux résultats, mais nourrit également des scénarios catastrophes. Étant donné qu'il n'y a aucune preuve que la dissociation des hydrates de gaz joue un rôle prépondérant dans les émissions (globales) de CH4 et que plusieurs sources répandues et peu profondes de CH4 pourraient générer la plupart des rejets ; une plus grande rigueur est nécessaire.

En ce qui concerne les milieux marins, les recherches émergentes mettent en évidence la vulnérabilité des hydrates à la dissociation actuelle et future sur les pentes continentales supérieures en réponse au réchauffement des eaux des profondeurs intermédiaires. 

À la lumière des prédictions selon lesquelles des milliers de fuites de méthane restent à découvrir [Boetius et Wenzhofer, 2013; Skarke et al., 2014] sur les marges continentales dans le monde, les enquêtes devraient se concentrer sur l'identification des sites où il y a une possible dégradation des hydrates de gaz sur les talus continentaux supérieurs. Ces recherches devraient mieux établir les contraintes de la dynamique des réservoirs d'hydrates, la libération de CH4 et le cycle du carbone en réponse au forçage climatique actuel.  

Comme pour les plates-formes océaniques circum-arctiques, il est important de continuer d'étudier les sources des émissions de CH4 sur les pentes continentales supérieures pour éviter d'attribuer trop d'importance à la dissociation des hydrates et établir des liens clairs entre les émissions de CH4 et les hydrates de gaz connus est essentiel pour démontrer l'interaction des hydrates de méthane avec le climat.  

Une glace limpide d'un lac en Alaska nous montre des bulles de méthane. Bien sûr, il y a du méthane qui s'échappe de l'Arctique, mais ça fait des dizaines de milliers d'années que ça se produit.
Dans le même temps, les études paléoocéanographies focalisées devraient également jauger les limites des variations de température de l'eau de fond sur les pentes supérieures des derniers 20 000 ans, la période critique pour placer les émissions actuelles dans le contexte des changements climatiques et océanographiques depuis le dernier maximum glaciaire.
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     Donc... 

Cet étude ne nie pas la possibilité qu'un relâchement important de méthane se produise, elle dit que le risque est moins élevé que ce que l'on croyait.

En gros, cette étude nous dit 4 choses.
  1. Que du méthane s'échappe de l'océan Arctique depuis 20 000 ans.
  2. Que la croissance du taux de méthane observée est principalement liée aux activités humaines.
  3. Que la fonte actuelle du pergélisol terrestre émet déjà du méthane à cause du réchauffement climatique.
  4. Qu'il y a moins d'hydrates de méthane au fond de l'Arctique que ce qu'on avait estimé.
Maintenant que nous sommes un peu rassuré, passons à la lutte contre ce réchauffement climatique dont nous sommes la seule cause, c'est démontré ça aussi.
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Article complémentaire via Wally 06 qui explique comment le méthane est oxydé : Le mystère de l'oxydation du méthane dans l'océan est percé.
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Récemment, nous avons appris qu'il y avait eu une hausse importante de méthane dans l'atmosphère et que cette hausse provenait apparemment de l'agriculture. Nous allons parler de cela dans un article à venir. Ce ne sont pas les sujets qui manquent.
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Si je dis "nous" c'est que 5 personnes se sont récemment regroupées pour former un collectif d'auteurs et de collaborateurs et nous allons nous entre-supporter dans le but de vous fournir des articles qui nous l'espérons, seront de meilleur qualité.

il y a moi, A. Randomjack,
Yoann de Docu Climat,
Michel-Pierre COLIN du blogue L'Énergie renouvelable, c'est la vie durable,
Heel Krix du blogue LE KAVE SE REBIFFE
Wally 06 propriétaire de la collection "Notre Planète"

mercredi 1 mars 2017

Comment tout va s'effondrer - par Michel-Pierre Colin

Petit manuel de collapsologie à l'usage des générations présentes
Pablo Servigne et Raphaël Stevens

Les auteurs avaient choisi ce titre pour leur livre, mais l'éditeur a changé ce « va » en « peut » pour des raisons commerciales. C'est pourquoi il faut rétablir la certitude qui existe dans l'esprit de Pablo Servigne et de son coauteur, de l'effondrement très proche (la génération présente) du monde tel que nous le connaissons y compris celle du genre humain sur la planète Terre.

Dans les conversations on entend de plus en plus souvent des expressions comme : « on va droit dans le mur », « les animaux sont en pleine extinction des espèces », ou « pourquoi font-ils encore des grosses par les temps qui courent ». Les médias parlent de catastrophe pour les avions qui s'écrasent, les trains qui déraillent, mais ne parlent pas des catastrophes qui durent, celles qui ne suivent pas le rythme de l'actualité, comme les crises environnementales, économiques, énergétiques, climatiques, qui ont passé des points de non-retour. Toutes ces crises sont interconnectées et se nourrissent les unes des autres.

Ce livre nous apporte un immense faisceau de preuves, avec plus de 400 références, qui suggèrent que nous faisons face à des instabilités systémiques de plus en plus grandes. Elles menacent certains peuples, voire les humains dans leur ensemble, à se maintenir dans un habitat viable. Il s'agit d'un effondrement pour lequel les auteurs reprennent la définition d'Yves Cochet : « l'effondrement est le processus à l'issue duquel les besoins de base (eau, alimentation, logement, habillement, énergie, etc.) ne sont plus fournis [à un coût raisonnable] à une majorité de la population par des services encadrés par la loi ».

Les auteurs utilisent la métaphore de la voiture pour nous expliquer les notions de limites infranchissables et de frontières transgressibles. La disponibilité du carburant est une limite infranchissable dont j'ai déjà parlé dans « Les limites à l'extraction du pétrole et autres minerais ».
En définitive, nous payons nos énergies en créant de la dette qui est reprise par nos banques centrales (en Europe au rythme de 80 milliards d'euros par mois). Maintenant que le coût de ces ressources devient trop élevé, le système basé sur la dette ne fonctionne quasiment plus. Le plus urgent pour l'avenir est de savoir combien de temps notre système économico-énergétique peut encore tenir. Nous vivons les derniers toussotements du moteur de notre voiture qui représente notre civilisation industrielle avant son extinction.

Les frontières franchissables pour notre voiture sont des sorties de route qui nous amènent sur des seuils de basculement au-delà desquels il n'est plus possible de revenir en arrière comme le réchauffement climatique qui provoque des événements extrêmes comme tempêtes, ouragans, inondations, sécheresse, pénuries d'eau, vagues de chaleur plus longues et plus intenses. On constate déjà des contrecoups comme la fonte des glaces aux pôles et des glaciers, la modification de la circulation des courants océaniques, des pénuries d'eau, la propagation de maladies contagieuses, la prolifération de ravageurs et de nuisibles, l'extinction de nombreuses espèces vivantes, la destruction des écosystèmes, la diminution des rendements agricoles, des pertes économiques, des troubles sociaux et de l'instabilité politique.

« Le dernier rapport du GIEC indique la possibilité de rupture des systèmes alimentaires qui augmentera les risques de guerres civiles et de violences intergroupes. Mais le problème de ce rapport est qu'il ne prend pas en compte les effets amplificateurs des nombreuses boucles de rétroactions climatiques, comme la libération de grandes quantités de méthane dues au dégel du pergélisol. Or, ces boucles sont susceptibles de se déclencher à partir de +3°C ou +4°C. Au-delà, il est très difficile de décrire précisément ce qui pourrait advenir. Néanmoins, les scénarios des experts sont en général unanimes et virent très rapidement à la catastrophe » (page 73).

« Pour que les paléontologues parlent de « sixième extinction de masse » il faudra arriver à ce que plus de 75% des espèces de la planète disparaissent. (N.B. 58% a été annoncé). Pourtant la société ne reconnaît pas encore le déclin de la biodiversité comme un facteur majeur de changement global, au même titre que d'autres crises qui mobilise la communauté internationale, comme le réchauffement climatique, la pollution, le trou dans la couche d'ozone ou l'acidification des océans » (page 81).

D'autres frontières planétaires ont été transgressées : le changement climatique, la biodiversité, le changement d'affectation des sols (déclin des forêts), les grands cycles biogéochimiques de l'azote et du phosphore. Ces quatre domaines sont des frontières qui ont été perturbées de manière irréversible.

L'effondrement est maintenant plus proche. Il n'est donc plus question d'arrêter net l'usage des énergies fossiles car cela mènerait à un effondrement économique, social et politique, et peut-être à la fin de la civilisation thermo-industrielle. Mais, maintenir en route le moteur de notre voiture mène à transgresser plus de frontières, donc à d'autres points de basculement climatiques, écologiques, doublé d'un effondrement du genre humain.

Nous sommes prévenus :
« Aujourd'hui nous sommes sûrs de quatre choses :
1. La croissance physique de nos sociétés va s'arrêter dans un futur proche ;
2. Nous avons altéré l'ensemble du système Terre de façon irréversible ;
3. Nous allons vers un avenir très instable, « non linéaire » (exponentiel) dont les grandes perturbations seront la norme ;
4. Nous pouvons désormais être soumis potentiellement à des effondrements systémiques mondiaux » (pages 129-130).

Y-a-t-il des signaux précurseurs d'un effondrement ? Pas vraiment. Les tentatives de développer des signaux avant-coureurs ont échoué ou ne font pas consensus pour le moment entre chercheurs. Il est conseillé d'adopter une attitude de « catastrophisme éclairé » : agir comme si ces changements abrupts étaient certains, et tout faire pour qu'ils ne se réalisent pas.

Cliquer pour agrandir
Parmi les modèles mathématiques, un seul modèle qui a plus de 45 ans est assez robuste, le modèle de Donella et Dennis Meadows. Au MIT le modèle informatique systémique World3 décrit les interactions entre les paramètres du monde, dont les plus importants sont : la population, la production industrielle, la production de services, la nourriture, le niveau de pollution et les ressources non renouvelables. Le but est de simuler le système monde sur la base des données réelles de 1972. Le premier résultat dans un scénario « business as usual » met en évidence un monde extrêmement instable qui prévoit un effondrement au XXIe siècle. La production agricole s'effondre entre 2015 et 2025, puis la population diminue. 


Les chercheurs ont modélisé des scénarios alternatifs menant à des effondrements et se sont aperçus qu'ils pouvaient stabiliser un monde soutenable en modifiant simultanément plusieurs paramètres à partir de 1980. Ces paramètres sont :
- Stabiliser la population mondiale ;
- Stabiliser (limiter) la production industrielle ;
- Diminuer les niveaux de pollution et d'érosion des sols.
Ce scénario d'équilibre devait permettre à moins de 8 milliards d'habitants de vivre à un niveau de vie proche de ce que nous connaissons. Ceci a été publié pour la 3ème fois en 2004. Les mises à jour du modèle en 1992 et 2002 ont confirmé les résultats initiaux et ont montré que rien n'a été fait pour éviter le scénario « business as usual », c'est à dire le pire scénario. Le modèle a résisté à 40 ans de violentes critiques et a corroboré 40 ans de faits.

L'effondrement de la civilisation industrielle est un predicament, mot anglais qui désigne une situation inextricable, irréversible et complexe pour laquelle il n'y a pas de solution. Mais il y a cependant des choses à faire sur le plan local pour créer les conditions résilientes de vie ultérieure. Selon l'ingénieur russo-américain Dmitry Orlov qui a étudié l'effondrement soviétique, on peut décomposer l'effondrement en cinq stades, dans un ordre de gravité croissant, constituant l'échelle d'Orlov : financier, économique, politique, social, culturel et écologique[i]

Plus sérieusement, le modèle d'effondrement systémique basé sur l'étude des dynamiques des systèmes complexes et des réseaux (pages 193-194) décrit notre civilisation comme un système hautement complexe avec (1) dépassement de points de basculement invisibles, (2) des relations de causalité non-linéaires, (3) des boucles de rétroaction amplificatrices nombreuses. Ce modèle prédit des dépassements de seuil inaperçus avec effets ultérieurs non-linéaires et brutaux. Dans des situations d'urgence notre capacité adaptative (résilience des institutions et des hommes) est réduite et nous rend moins aptes à organiser des « relances ».

Dans cet ordre d'idées, le problème majeur est le risque nucléaire. Devant le désintérêt de la génération présente à acquérir ce savoir, devant les jeunes diplômés qui quittent la filière, et devant le départ en retraite de la moitié du personnel travaillant dans les centrales nucléaires, comment va-t-on « gérer » le risque nucléaire dans des situations d'urgence ? Ces importantes pertes de compétences sont déjà de nature à déclencher un effondrement. Il faut toujours garder à l'esprit que l'arrêt définitif d'un réacteur demande un an de refroidissement et au moins une décennie pour son démantèlement avec toute l'électricité et le carburant nécessaire pour ce faire. De plus, qui pourra garantir le maintien en poste de centaines de techniciens et d'ingénieurs chargés de ces opérations ? Outre les causes d'accident déjà relevées à Tchernobyl et Fukushima, le réchauffement climatique ajoute de nouvelles instabilités comme les inondations tempétueuses et le manque d'eau de refroidissement et des effets indirects liés aux migrations comme le terrorisme et les conflits armés.

Dans l'étude de l'être humain face à l'effondrement, on ne peut écarter l'examen de la démographie. Aborder le sujet en public est absolument tabou, car cela amène toujours à la même question : « Vous voulez faire comme en Chine, c'est ça ? ». Le chiffre de 9 milliards en 2050 est une prévision mathématique sortie d'un modèle théorique qui peut s'énoncer : la population devrait arriver à 9 milliards en 2050 toutes choses étant égales par ailleurs.

Pour l'équipe Meadows au MIT, la démographie du système-Terre, marqué par l'instabilité de notre civilisation industrielle, mène à un déclin irréversible et incontrôlé à partir de 2030. L'être humain est partagé entre les imaginaires cornucopien – l'avenir est un progrès continu et illimité grâce à la technologie et à l'inventivité – et malthusien – l'avenir arrive à un moment où des limites ne permettent plus de continuer une croissance démographique continue – ce qui l'amène à alterner ces imaginaires au cours des cycles millénaires de civilisations : naissance, croissance, stagnation, déclin, puis renaissance ou extinction.

Selon Harald Welzer, la sociologie de l'effondrement montre comment une société peut lentement et imperceptiblement repousser les limites du tolérable au point de remettre en cause ses valeurs pacifiques et humanistes et sombrer dans l'inacceptable. C'est le cas des politiques de plus en plus agressives envers les migrants déjà touchés par les catastrophes. Les grandes catastrophes peuvent ainsi induire une colère généralisée des populations envers les gouvernements et les institutions dans les prochaines années.

Après une catastrophe qui suspend les activités normales et cause des dommages sérieux à une communauté, la plupart des gens montrent des comportements extraordinairement altruistes, calmes et posés. Certains prennent même des risques insensés pour aider les personnes autour d'eux. L'image d'un être humain égoïste et paniqué n'est absolument pas corroboré par les faits. Nous entrons bientôt dans l'ère de l'entraide. Par contre, en cas d'effondrement énergétique les individualistes seront les premiers à mourir. En cas d'effondrement à répétition (p.ex. effondrement boursier puis énergétique) certains seront obsédés par revenir à l'ordre antérieur, d'autres se concentreront sur la pérennité des institutions, et d'autres en profiteront pour changer l'ordre social.

Cette transition vers une autre société nous oblige à travailler notre imaginaire, donc de nous faire des récits pour inverser ces spirales de violence et de pessimisme. Des récits qui rejettent toute dissonance cognitive et tout déni. Soyons les transitionneurs qui inventent leur propre avenir. Car les initiatives de transition libèrent les gens de ces sentiments d'impuissance tellement toxique et répandue dans la population. L'urgence est de reconstruire un tissu social local solide et vivant, doté d'un climat de confiance, c'est-à-dire un véritable « capital social » qui puisse servir en cas de catastrophe.

Pourquoi « les gens n'y croient pas », c'est-à-dire la psychologie de l'effondrement tient à cette tendance des gens, lorsqu'on leur dit la vérité, à devenir pessimistes, résignés ou à juste rejeter le message. Selon Clive Hamilton dans « Requiem pour l'espèce humaine », (et aussi Paul Jorion dans « Le dernier qui s'en va éteint la lumière ») nous ne sommes pas équipés pour percevoir les dangers que représentent les menaces systémiques, ni les menaces à long terme. Nos cerveaux sont trop habitués à effectuer des problèmes immédiats et ont développé des sensibilités aux dangers concrets et visibles. C'est le problème de la grenouille et de l'eau bouillante. 


Dans le cas du déni, les gens ne trouvent pas crédible les données scientifiques ni les constats alarmants des médias, car l'obstacle c'est l'impossibilité de croire que le pire va arriver. Les données étant de plus en plus précises au fil du temps, les négationnistes continuent à changer les raisons de ne pas changer leur comportement.

Parmi les personnes qui semblent convaincues, on distingue cinq catégories de réactions : 


Les çavapétistes (« ça va péter ») montrent un imaginaire de la catastrophe très sombre, nihiliste même, montrant une colère envers la société. Cette attitude est toxique en temps de catastrophe pour l'organisation politique et sociale. 


Très fréquents, les aquoibonistes (« à quoi bon ? ») sont ceux qui disent « foutu pour foutu, profitons de ce qui nous reste ! ». Avec deux tendances, l'épicurien style Rabelais qui savoure les plaisirs de la vie, et « l'enfoiré » qui veux tout consommer ou saccager avant de partir.


De plus en plus nombreux, les survivalistes ou preppers (« à chacun sa merde ») se barricadent, s'enferment, se bunkérisent, stockent le nécessaire, s'informent sur la purification de l'eau, les plantes sauvages. Leur imaginaire c'est Mad Max et la croyance que l'être humain est profondément mauvais. 


Les transitionneurs (« on est tous dans le même bateau ») souvent non-violents, collectivistes, appellent à une transition à grande échelle, car la vie n'a plus de sens si tout s'effondre. Pratiquant l'ouverture et l'inclusion, ils sont convaincus que l'avenir est dans les éco villages, l'entraide et l'imaginaire de transition. Ils pensent « ensemble on va plus loin ». 


Les collapsologues ont une passion pour le sujet. Étudier, partager, écrire, communiquer, comprendre, devient une activité chronophage pour ces « geeks du collapse » dont les plus célèbres sont nommés « collapsniks » qui sont souvent des ingénieurs et des hommes. Ce clivage homme femme se révèle quand les hommes débattent de chiffres, de faits et de techniques, tandis que les femmes abordent les aspects émotionnels et spirituels.

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Comment vivre avec, et vivre en bonne santé, consiste à voir dans la nécessaire transition psychologique un processus de deuil qui traverse cinq étapes selon le modèle de Élisabeth Kübler-Ross, psychologue américaine spécialiste du deuil : le déni, la colère, la peur (marchandage), la dépression et l'acceptation. On a constaté que les moments de témoignages et de partage d'émotions avec d'autres, permettent aux personnes présentes de prendre conscience qu'elles ne sont pas seules à affronter cet avenir et à ressentir ces émotions, à exprimer leur colère envers les hommes politiques, les dirigeants des multinationales et les climato-négationnistes, tous responsables du retard impossible à rattraper.

On ne peut pas attendre que chacun fasse son deuil avant de commencer à agir. Dans la politique de l'effondrement l'action fait partie de la « transition intérieure » qui permet dès la prise de conscience de sortir de l'état d'impuissance et maintient l'optimisme. Il n'est jamais trop tard pour construire des petits systèmes résilients à l'échelle locale, afin de mieux encaisser les chocs économiques, sociaux et écologiques à venir. 


Parmi les systèmes anticipatifs résilients, on compte les coopératives citoyennes de production d'énergies renouvelables, les groupements alimentaires locaux ou de nouveaux modèles économiques et monétaires locaux et coopératifs. Tout en permettant la coexistence de deux systèmes, l'un mourant l'autre naissant. Cette politique paradoxale à la fois catastrophiste et optimiste, pose le problème qu'il faille accepter publiquement et officiellement la mort du vieux monde, les populations réagissant par des troubles qui précipiteront ce qu'on voulait anticiper.

Les transitionneurs n'attendent pas les gouvernements, ils inventent la façon de vivre l'effondrement de manière non-tragique. Une fois « branchés » sur des petits systèmes autonomes, résilients et low tech, les transitionneurs peuvent alors « se débrancher » de l'ancien système qui risquait de les emporter dans sa chute. C'est passer de l'indépendance à l'interdépendance : une mosaïque de petites démocraties locales est-elle un projet démocratique ?

En fait, il n'y a même pas de solution à chercher à notre situation inextricable (predicament) , il y a juste des chemins à emprunter pour s'adapter à notre nouvelle réalité. L'utopie a changé de camp : l'utopiste est celui qui croit que tout peut continuer comme avant, le réaliste met toute son énergie dans la construction de résilience locale, qu'elle soit territoriale ou humaine.

La collapsologie est l'exercice transdisciplinaire de l'étude de l'effondrement de notre civilisation industrielle, et de ce qui pourrait lui succéder, en s'appuyant sur les deux modes cognitifs que sont la raison et l’intuition, et sur des travaux scientifiques reconnus.
Les auteurs pensaient au début 2015 que la fenêtre d'opportunité pour éviter un effondrement global étaient déjà en train de se refermer.
« Pendant sa tournée européenne 2011-2012, Dennis Meadows, plus pessimiste que jamais, répétait dans les interviews et dans un article écrit pour l'institut Momentum :
il est trop tard pour le développement durable, il faut se préparer aux chocs et construire dans l'urgence des petits systèmes résilients » (page 173).

L'effondrement n'est pas la fin mais le début de notre avenir !




[i] L'effondrement soviétique s'est arrêté au stade politique. L'effondrement social se retrouve dans des conflits internes : guerre civile et « chacun pour soi » avec un processus de dépeuplement qui se met en place. L'effondrement culturel se produit lorsque la foi en l'humanité est perdue. Le stade d'effondrement écologique est atteint quand la possibilité de redémarrer une société ne semble plus possible à cause d'un environnement épuisé.